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Ce texte est issu d’un travail précédemment effectuée pour une pétition déposée sur le site de l’Assemblée nationale (disponible à cet endroit) et est disponible ici à titre d’archive.


Pour l’indemnisation d’un salarié suite à une absence pour maladie ou accident, le Code du Travail stipule que l’indemnité complémentaire est versée ”[…] en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu […]” (article L1226-1 du Code du Travail). De fait, l’absence d’un salarié est conditionné par le passage obligatoire dudit salarié chez un professionnel de santé pour attester du problème de santé.

Si ce mode de fonctionnement est efficace dans le cadre de problèmes de santé de moyenne à longue durée, il est néanmoins pénalisant dans le cadre de problèmes très courts et ponctuels.

En effet, le droit à une indemnité s’inscrit uniquement dans le cadre, au minimum, d’une consultation médicale résultant généralement sur un jour de repos, celui-ci étant déjà en partie consacré à l’obtention de la même consultation. Le jour de repos est donc, en tant que tel, un jour de justification plus qu’un jour de repos.

Le Code de la sécurité sociale définit aussi que : “L’indemnité journalière est attribuée à l’expiration d’un délai de carence de trois jours en cas d’hospitalisation et de sept jours en cas d’accident ou de maladie, à compter de la constatation médicale de l’incapacité de travail.” (article D613-19 du Code de la sécurité sociale) (sauf changement par la convention collective, les accords de branche ou les accords d’entreprise). Sur ce principe, obtenir un arrêt de travail n’a comme seul avantage, pour le salarié, de pouvoir obtenir un temps de repos dédié à la récupération du problème de santé. En pratique, les salariés vont même jusqu’à utiliser un ou plusieurs congés payés pour palier à cette carence, ou cacher le problème de santé dans le but de continuer l’exercice professionnel et d’être rémunéré.

Sur ce modèle, il est notable que les problèmes de santé courts n’ont absolument aucun avantage à être déclarer, qu’il s’agisse du côté salarial (perte temporaire du salaire) ou côté patronal (perte de productivité). L’ajout de la nécessité d’accéder au parcours médical accentue le non-intérêt de l’arrêt de travail sur des périodes courtes, étant donné que le salarié doit effectuer des démarches en lieu et place de se reposer.

Il est aussi à noter que l’accès à un professionnel de santé est devenu souvent difficile, en particulier dans les zones rurales, dû à l’augmentation des déserts médicaux (voir le rapport numéro 4711 de la Commission des Affaires sociales sur la proposition de loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale). En complément, la consultation pour un problème bénin entraîne une surcharge des professionnels de santé dans l’unique but administratif.

Nous avons donc un système d’arrêt de travail déficient, entraînant dans le cas des problèmes de santé à courte période :

  • soit, dans le cas où le problème n’est pas déclaré, une perte de finances et de productivité pour l’entreprise, le salarié étant souvent non-efficace pour l’entreprise pendant l’existence du problème.
  • soit, dans le cas où le problème est déclaré, une perte du temps de repos du salarié, une surcharge des professionnels de santé pour des problèmes sans aucune nécessité médicale mais avec une nécessité administrative.

Pour contrer le problème, il serait pertinent que les entreprises jouissent d’un droit pour arrêter le travail d’un salarié à la demande de celui-ci. Ce droit ne pourrait être applicable que durant la période existante de carence, et toute interruption du travail prolongée au-delà de cette période engendrerait un retour au système classique de justification médicale. Ce droit pourrait être applicable un nombre maximum de fois par an (un dépassement de ce seuil provoquant une justification médicale) permettant d’éviter un abus de ce droit.

Ce droit pourrait aussi être étendu par les conventions collectives, les accords de branche ou les accords d’entreprise en permettant aux entreprises de garantir un pourcentage du salaire pendant le délai de carence ou en modifiant le nombre de congés médicaux de courte durée possible avant justification médicale. Dans une autre mesure, le seuil pourrait être rehaussé pour des salariés atteints d’affection à longue durée ayant des crises ponctuelles.

Cette nouvelle catégorie de congé permettrait d’obtenir un mécanisme morderne pour que les entreprises puissent proposer de nouveaux avantages aux salariés sans conséquence sur les finances de la Sécurité Sociale. Mieux encore, ce droit permettrait d’améliorer la confiance entre entreprises et salariés, en évitant aux salariés de devoir utiliser des congés payés ou de cacher leurs conditions de santé dégradées via, par exemple, l’utilisation du télétravail quand celui-ci est possible (provoquant une méfiance de l’entreprise par rapport à cette pratique).

De plus, par sa nature de droit, il ne s’agirait que de proposer un nouveau mécanisme sans obligation de l’appliquer. Il ne s’agit donc pas d’une modification législative avec une implication concrète et radicale sur les entreprises, celles-ci étant libres d’utiliser ce droit ou non. Aussi, l’application de ce droit par un salarié implique l’accord de l’entreprise, celle-ci gardant la décision finale sur le congé médical.

Dans le cas d’une application dans son plus simple appareil, le congé médical n’est qu’un congé sans solde symboliquement donné pour raison médicale (avec possibilité de prolongation revenant dans le cadre de l’arrêt de travail déjà légiféré). Mais dans des versions agrémentées par les évolutions détaillées précédemment, le congé médical devient un argument promotionnel intéressant pour les entreprises, permettant de vanter de meilleures conditions de travail, et donc d’être plus attractive et compétitive sur le marché de l’emploi européen.

La création de ce droit n’est pas non plus un affaiblissement du droit social français, étant donné que le refus de l’entreprise permet au salarié de revenir dans le parcours classique de l’arrêt de travail par justification médicale tel que défini par le Code du travail.

Pour les salariés, ce droit permettrait de pouvoir gérer des problèmes de santé de courte durée auto-diagnostiquables et ponctuels (intoxication alimentaire, crise d’endométriose, règles douloureuses, migraine, etc.). Ces problèmes sont généralement connus par les victimes, et ne nécessitent pas de médication autre que du repos. La gestion de ces problèmes par congé médical donnerait davantage de confort et de repos aux salariés, tout en permettant aux entreprises de récupérer des salariés plus reposés et donc plus productifs.

Il est à noter que ce droit doit suivre le secret médical, empêchant l’entreprise de juger de l’état de santé de son salarié. Le droit s’applique donc sur une relation de confiance entre l’entreprise et le salarié, et permet de conserver le principe de non-discrimination (ici, pour raisons de santé) décrit par l’article L1132-1 du Code du travail.